Deux poids, deux mesures. Par Françoise Näser

Assistante maternelle, auteur

assistante maternelle et enfant
A propos des assistantes maternelles, il faut que je vous dise : c’est très compliqué ! C’est compliqué de parler des assistantes maternelles, d’émettre un avis ou d’écrire sur les assistantes maternelles, et ce, de manière généraliste. Car dans notre profession, on pourrait chanter comme dans la comptine, c’est « à la mode de chez nous » : d’un bout à l’autre de la France, d’Est en Ouest, les us et coutumes, les règles et les réglementations sont différents. Oui, mais un peu de couleur locale ne nuit en rien à un bon fonctionnement, me direz-vous ! Il est même précisé, à juste titre, que lors de la demande d’agrément et lors de l’accompagnement des assistantes maternelles « selon les situations individuelles rencontrées, les domaines d’évaluation seront approfondis de façon différente » (1) Cela laisse donc une certaine marge de manœuvre aux personnels des PMI et aux Conseils Départementaux pour apporter des modifications au référentiel d’agrément (2) qui devrait être la loi, la seule, l’unique référence sur laquelle nous devrions pouvoir nous baser pour travailler sereinement, et ce, peu importe où nous résidons. Et effectivement, si ces différences étaient dues à des contraintes régionales, à des habitudes ancrées dans le quotidien de tous ou bien encore justifiées par une quelconque logique, alors bien sûr, nous accepterions bien volontiers de nous plier à ce jeu des interprétations. Parce que des différences il y en a tellement ! Et quand je dis « différence » d’une région à une autre, d’un département à un autre, ou même d’une ville à une autre, j’entends plutôt des divergences voire même des contradictions.

Ce qui est avancé, la plupart du temps, pour justifier les règlements locaux modifiant le référentiel national c’est avant tout la sécurité des enfants. C’est bien sûr l’enjeu principal, l’objectif recherché, le but de toutes ces règles plus ou moins contraignantes. La sécurité des enfants doit être notre priorité. Bien entendu, nous sommes des personnes adultes et responsables, bien conscientes des enjeux. On peut s’étonner cependant que d’un département à un autre, on voit les choses de manière si différente, en matière de sécurité... Le fait est que nous travaillons à notre domicile (lieu de tous le dangers !), avec nos familles (nos enfants, nos conjoints font-ils encore partie intégrante d’un accueil individuel et familial ?), nos animaux de compagnie (nos chats, nos chiens et autres canaris sont-ils encore les bienvenus ?), nos jardins (plantes, piscines et même bacs-à-sable font l’objet d’une surveillance particulière, voire d’une interdiction), nos invités (ah nos invités !!! Papy, Mamy, doivent-ils fournir un extrait de casier judiciaire dès qu’ils franchissent notre porte ?). Lorsque j’écris qu’il est demandé à nos collègues dans certains départements d’inscrire leurs enfants à la cantine ou d’interdire à leur conjoint de rentrer déjeuner le midi, de vives protestations se font entendre de Rennes, Nice ou Périgueux pour crier au scandale : et pourtant ! Lorsque je prétends qu’il est parfois interdit de se réunir de manière informelle, avec les petits que nous accueillons pour des temps de jeux en commun, c’est de Toulouse, Clermont-Ferrand ou Strasbourg que viennent les dénégations de collègues chez lesquelles de telles initiatives sont tout au contraire valorisées et plébiscitées tant par les parents que par les autorités locales.

C’est à n’y rien comperendre ! Nos collègues qui sont amenées à déménager régulièrement le savent bien : nouveau département, nouvelles règles. Souvent en totale contradiction avec ce qu’elles connaissaient auparavant. Cette disparité de traitement n’étant pas sans provoquer un fort sentiment d’injustice.Là, on vous incitait à travailler en binôme, pour plus de sécurité : interdit ici ! Là on vous octroyait 4 agréments et des dérogations supplémentaires sans difficultés : ici, on s’étonne du nombre d’enfants que vous accueillez et on vous soupçonne de vénalité. Là les services de PMI avaient mis la barre très haut pour l’obtention de l’agrément, ici vous avez l’impression qu’il est distribué sur simple demande… Là vous pouviez compter sur le soutien sans faille de votre puéricultrice référente qui vous connaissait bien et avec laquelle vous travailliez dans un climat de confiance, ici vous êtes laissée entièrement seule dans l’exercice de votre métier et face aux nombreuses difficultés du quotidien, faute de personnels et de moyens. Les assistantes maternelles le réclament depuis longtemps : nous souhaitons une harmonisation des pratiques sur tout le territoire. Nous demandons à ce que le référentiel d’agrément soit appliqué, que les règles soient les mêmes partout, connues et comprises par tous. Nous voulons pouvoir travailler sereinement, encadrées avec bienveillance : comment pourrait-il en être autrement si nous voulons nous-mêmes pouvoir transmettre sérénité et bienveillance aux tout-petits que nous accueillons et à leur famille ?


Accueil du jeune enfant : lutter contre les gestes répétitifs

Par habitude ou lassitude, pour aller plus vite et gagner du temps, les professionnels de la petite enfance, malgré leurs convictions et leurs valeurs, finissent par répéter les mêmes gestes, un peu machinalement,  au cours d’une même journée. Au risque de faire primer le collectif et l’efficacité sur le respect de l’individualité et des rythmes de chaque enfant. L’analyse et les pistes pour éviter ce piège de Frédéric Groux, ancien EJE devenu psychologue en crèche.
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adute donne à manger à un enfant en EAJE
Le respect de l'individualité des jeunes enfants accueillis est une des valeurs fortes partagées par les professionnels de la petite enfance. Du moins en théorie. Car c'est parfois difficile de tenir cette idéologie dans un établissement petite enfance ou chez une assistante maternelle. Comment repérer lorsque le collectif prend le pas sur les petites personnes en construction que nous accueillons ? Les indices du collectif sont présents mais souvent masqués par le rythme et le programme d'une journée en crèche ou chez une assistante maternelle.

Gestes répétitifs et gain de temps
Un des premiers indicateurs du « penser collectif » est le geste répétitif. Si vous faites plus de 5 fois à la suite le même geste, vous êtes déjà dans le phénomène du travail collectif pour ne pas dire à la chaîne. Prenons un exemple : l'ouverture des pots de yaourt. Ils sont souvent ouverts par les accueillants et cela même dans les sections des grands. Or, il suffit selon l'âge de faire une petite ouverture pour que le jeune enfant arrive à le faire seul. Le gain de temps est souvent la raison de ce travail à la chaîne. La question est donc qu'allez-vous faire de ses précieuses secondes ? Que transmettez-vous comme message aux enfants ?

Les jeunes enfants deviennent passifs dans le quotidien et ne sont plus conscients d'être capables d'aider ou de faire eux-mêmes les actions. Aider est un sentiment qui améliore la confiance en soi et l'estime de soi. C'est une des raisons du choix de cette profession par de nombreux accueillants et assistantes maternelles. Nous souhaitons « être utiles » aux autres. Il n'est jamais bon de rendre une personne passive dans sa vie. D'ailleurs, de nombreux employés se plaignent de faire selon les désirs de leurs hiérarchies sans avoir un mot à dire. Nous sommes dans la même situation miroir. Un employé en situation d'attente des ordres ou des nouveaux protocoles se sent impuissant et, donc, il n'est plus acteur de sa vie professionnelle. La notion de temps est relative selon les actions. Dans l'exemple précédent, une personne de crèche ouvrira 6 à 7 yaourts en pensant gagner du temps et donc ne pas faire attendre les enfants qui ont faim. En revanche, dans de nombreux lieux, les serviettes ou bavoirs sont avec des lanières à attacher autour du cou de chaque enfant deux fois par jour. Dans cette situation, où est le gain de temps ?

Si une répétition est présente, il y a une multitude de gestes identiques et ils sont exécutés de plus en plus rapidement. C'est le principe du taylorisme qui est la base du travail à la chaîne. Plus vous exécutez un acte, plus vous essayez d'améliorer votre temps d’exécution. Pensez-y quand votre collègue sortira du dortoir en disant : « J'ai endormi tant d'enfants en tant de temps ».  Ou « j’ai changé la couche de tant de bébés en tant de temps ». Tous les gestes répétitifs sont faits dans le silence, sans accompagnement de parole. Or, ce qui définit les êtres humains, c'est le langage.

Des bébés acteurs de leur quotidien
J'entends les personnes avancer l'argument du nombre d'enfants qui augmente sans cesse. Je vous l'accorde. Nous sommes dans une période difficile où des gestionnaires, peu formés à notre profession, décident des chiffres. Mais nos valeurs sont plus solides que leurs chiffres ou cases.
Nous pouvons réfléchir sur la place de sujet que doivent avoir les bébés et les jeunes enfants en EAJE ou chez une assistante maternelle. Est-il possible de retourner cette difficulté du chiffre pour faire avancer notre pratique ou la repenser ?
Est-il possible de se dire que les serviettes peuvent avoir des élastiques où des scratchs pour s'attacher ? Est-il possible de penser qu'on n'endort pas un enfant mais qu'il trouve son sommeil de lui-même, si on met les conditions nécessaires pour l'aider ?
Est-il possible de faire sortir les jeunes enfants de cette place de « non-sujet » pour les faire devenir acteurs dans leur quotidien ?

Tous les actes de répétition (non réfléchis) effacent la singularité du développement moteur ou cognitif des enfants accueillis. Nous arrivons à respecter ce rythme de développement dans les sections de bébés mais, lorsqu'un enfant passe dans une section de moyens ou de grands, nous perdons ce regard sur sa capacité à évoluer selon son propre tempo. Nous aurons chez les moyens alors un pot de yaourt ouvert par l'adulte mais ce même pot ne sera pas pratique pour manger car les rebords sont trop hauts et qu’un bol ou une coupelle serait plus facile pour eux. Nous pouvons prendre aussi l’exemple des verres à bec donnés à tous les enfants d’une même section alors que certains pourraient boire dans un verre classique.
 
Ce n'est jamais la section (tranche d'âge) qui décide comment se comporter avec le bébé ou l'enfant qui est en face de nous. Au contraire, nous devons nous ajuster à l’évolution de chaque petit être en construction de ladite section. C'est le reconnaître en tant que sujet et individu. Ce n'est pas qu'un principe pédagogique mais juste une marque de respect dont chaque « être humain » doit pouvoir bénéficier. Les enfants ne sont pas des citoyens de seconde classe.

Assistante maternelle : un programme pour éviter les maux de dos et rester en forme

S’occuper de jeunes enfants n’est pas de tout repos et les ports de charges répétitifs ainsi que les postures à risque pour le dos sont le lot quotidien des personnels du secteur de la Petite Enfance. On fait le point sur les risques rachidiens et TMS pour les assistantes maternelles et la manière de les éviter au quotidien.
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femme qui fait du sport
Depuis des siècles on considère « normal », « naturel » que les femmes s’occupent des enfants. De leurs enfants bien sûr, mais également de ceux des autres et ce n’est que récemment que le métier d’Assistantes Maternelle a été reconnu comme une véritable profession. Mais ce métier a des contraintes physiques qu’il ne faut pas sous-estimer car même si les tous petits pèsent moins que 25Kg (charge au-delà de laquelle la médecine du travail considère qu’il y a un risque de blessures rachidiennes chez la femme), les manœuvres de soulèvement et de dépose répétitives sont très dangereuses si elles ne sont pas correctement effectuées.

Des risques spécifiques quand on s'occupe de tout-petits
Quand une femme a des enfants, elle s’en occupe mais ceux-ci grandissent et un jour elle n’a plus besoin de les porter. Ce n’est pas du tout le cas des assistantes maternelles (assmat) qui tout au long de leur carrière professionnelle vont avoir à s’occuper de tout petits enfant dont l’âge varie de 3 mois à 3 ans et le poids de 5Kg à 15/20Kg. Avec un agrément de trois enfants en garde, c’est plusieurs dizaines de manœuvres de soulèvement/dépose effectués quotidiennement et par conséquent, c’est plusieurs tonnes de pression qui écrasent les derniers Disques Inter Vertébraux (d.i.v.) lombaires. L’arrivé dans la vie active se situant actuellement entre 23 et 25 ans, l’âge de la retraite sera donc aux alentours de 66 ou 68 ans. Même résistants, les d.i.v. ne tiendront pas ce rythme pendant les 43 ans et bon nombre de professionnelles de la petite enfance seront dans l’incapacité de travailler bien avant l’âge de celle-ci. Terminer précocement son activité professionnelle à cause des douleurs de la colonne vertébrale, des genoux ou des épaules est donc une fatalité pour les femmes qui s’occupent de nos charmants bambins ? Non, bien sûr ! Mais c’est malheureusement le lot de bon nombre d’assmat actuellement et il faut lutter contre cette situation de souffrance physique et psychologique.

Se former pour adopter les bons gestes et une bonne posture
C’est « l’Ecole du Dos de la Petite Enfance » qui enseigne les techniques de port de charge aux professionnelles de la petite enfance afin de prévenir les risques rachidiens et les TMS.
Cette formation doit être effectuée par des professionnels compétents et doit être axée autour des techniques suivantes :

• Ne jamais se trouver en situation de déséquilibre avant (c’est la balance rachidienne)



• Elargir ses appuis au sol lors des efforts de soulèvement/dépose.



• Utiliser la technique du verrouillage lombaire lors des postures à risques.



• Effectuer la manœuvre du balancier pour équilibrer la charge.



Maintenir une bonne condition physique
La fonction d’assistante maternelle est donc un véritable métier soumis à des risques rachidiens répétés durant toute la durée de l’activité professionnelle. Il faut donc entretenir son corps pour pouvoir effectuer les efforts de soulèvements/dépose des tout petits. Nous savons tous qu’une bonne condition physique, sans surpoids, permet de se maintenir en bonne santé. C’est d’autant plus important quand on exerce certains métiers ou le corps est sollicité en permanence. Mais quelle activité sportive pratiquer, que faire ? Il n’y a pas d’activité sportive spéciale, c’est juste une question de gout, d’affinités, de possibilités physique. Il ne s’agit pas de faire 6h de sport par semaine ni de ressembler à un athlète de haut niveau ! Non, il faut juste effectuer une activité régulière qui entretienne vos muscles abdominaux (nécessaires au bon maintien du bassin et de la colonne vertébrale) et vos membres inférieurs (nécessaires aux postures et positions pour les manœuvres de manutention de bébé). Les horaires de travail des assistantes maternelles sont compris entre 7h et 19h, il faut donc soit faire du sport le week-end, soit le soir. Bloquez un jour et un horaire et n’en dérogez pas ! Faites votre activité sportive avec une amie, une collègue, c’est la technique la plus efficace pour être sûr de pouvoir faire du sport régulièrement.

• Une activité sportive en groupe ou en salle de sport. C’est effectivement l’option la plus simple puisque les salles de sports offrent des horaires d’ouverture assez étendus qui vont permettre d’aller faire du sport après 19h. Mais il ne faut pas faire n’importe quoi ! Commencez par une activité « cardio » pour vous échauffer ; vélo, tapis roulant, elliptique, rameur, etc. au moins 30/40 minutes. Ensuite choisissez une activité qui vous convienne. Mais si vous désirez ne faire que du cardio ou de la musculation sur les machines, pourquoi pas ! Le step est une activité excellente qui renforce l’ensemble de la musculature du corps (cuisses, mollets, fessiers,) et le cœur.

• Une activité seule. C’est bien sûr possible : course à pied, vélo, sport collectif. Il faut une activité qui vous fasse travailler réellement. Les activités comme le yoga ou le stretching sont de bonnes activités mais insuffisantes pour entretenir une force musculaire, il faut donc toujours faire une activité « cardio » en plus de celle-ci. Le renforcement musculaire à l’élastique en Résistance Progressive (RP) est une technique simple, efficace et ludique qui doit être effectuée en plus d’une activité « cardio ». La musculation en Résistance Progressive offre l’avantage de pouvoir être effectuée pratiquement partout : à domicile, en extérieur, en salle, etc. A raison d’une heure par semaine en complément d’un effort de « cardio », vous aurez une musculature tonique.

Voici quelques exemples :

Renforcement des abdominaux








Allongée au sol genoux fléchis avec la bande élastique en point fixe avant qui passe devant vos cuisses. Ramenez vos genoux vers votre poitrine en soufflant.

Renforcement des muscles du dos














Debout le tronc incliné en avant avec les bras dans le prolongement du corps. Les genoux sont légèrement fléchis La bande élastique est tenue dans les deux mains. Tirez en écartant les mains.

Renforcement des cuisses













Debout avec la bande élastique en boucle et en point fixe avant qui passe derrière votre genou. Position sur un seul pied. A partir d’une position de légère flexion du genou, effectuez une extension vers l’arrière.

Renforcement des fessiers







Position quadrupédie (quatre pattes). La bande élastique est en boucle et passe devant votre cuisse et derrière le pied opposé. Poussez avec votre pied en arrière contra la résistance de l’élastique en maintenant la position. Effectuez 5 ou 10 mouvements et changez de côté.

S’occuper d’enfants à domicile ou en structure collective est un vrai métier avec de vraies contraintes de port de charge répétitives qui nécessite de garder un corps en bonne santé. Il faut donc s’organiser pour se garder du temps pour se maintenir en forme. La Résistance Progressive élastique (RP) est un des moyens d’entretenir sa musculature à moindre cout et sans contraintes. Les salles de sport offrent maintenant des possibilités horaires qui permettent aux ASSMAT d’aller faire de la gym après leur journée de travail. Faire du sport c’est aussi se valoriser et se prouver que l’on est pas seulement une femme qui s’occupe des autres (les tous petits) mais que l’on est une professionnelle qui entretient son corps. Et ça fait du bien !